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Touzazimutin

Va, vis, et deviens.

27 Novembre 2017, 20:26pm

Publié par Zazimutine

Va, vis, et deviens.

 

Ca s'est passé l'autre mercredi. J'accompagnais Miss Choco à son cours de théâtre, comme tous les mercredis, lorsque celle-ci me demanda explicitement de la "déposer". En précisant que je ne l'accompagne pas jusqu'à la porte, et que je ne vienne pas vérifier si elle était bien arrivée. Quelques semaines plus tôt, en effet, ne trouvant pas de place sur le parking, je lui avais proposé de descendre de la voiture et d'aller seule à son cours, pendant que je cherchais une place. Ne l'ayant pas vue entrer, j'étais allée vérifier ensuite sa présence au cours (lui collant probablement la honte sur 4 générations).

Revenons à ce fameux mercredi. Face à sa demande soudaine d'autonomie je suis restée aussi abasourdie que la fois où, dans un épisode de la petite maison dans la prairie, la voix qui doublait Laura Ingalls avait changé.

Il faut préciser que depuis leur naissance, mes deux filles n'ont jamais eu une demande forte d'indépendance. A 7 et 9 ans, elles me demandent encore de choisir leurs vêtements le matin, de les coiffer, voire certains soirs, de les doucher (en mode fatiguée/feignasse). La semaine précédente, j'avais d'ailleurs été agacée lorsque, à la piscine, miss Choco avait tenu à ce que je l'accompagne jusqu'au bord du bassin, alors que nous étions déjà en retard pour le cours. Je suis également souvent irritée quand je lui demande de poser une question à la maitresse, et que, par timidité, elle refuse systématiquement, m'obligeant à lui écrire un mot dans le cahier de liaison.

Mais mercredi, Miss Choco a gagné une petite victoire d'émancipation. Probablement poussée par le modèle de ses camarades de théâtre, un peu plus âgées qu'elle, qui arrivent unanimement seules au cours (je suis d'ailleurs souvent la seule à attendre la fin du cours à l'intérieur de la structure, et non dans ma voiture sur le parking). 

Pourtant, il va bien falloir s'habituer à ces petits pas qui conduisent peu à peu sur le chemin de la liberté. Il y aura le collège l'an prochain, et encore plein d'autres pas à effectuer.

Je mesure aussi ce que chaque pas signifie, et comme il nous rapproche, à chaque fois, de celui qui nous verra un jour atteint du syndrome du nid vide. Je n'oublie pas que cela fait partie du contrat, vous savez la petite case, tout en bas, qu'il fallait cocher lorsque nous avons déballé nos nouveaux-nés, celle qui précisait: "attention, ce produit est de très bonne qualité mais pour sa bonne conservation, vous veillerez à faciliter son épanouissement en ne lui demandant rien en retour, en le poussant à voler de ses propres ailes, en ne mettant aucun obstacle entre lui et ses aspirations, que ce soit sous forme de culpabilisation ou de chantage affectif; cet alinéa est non négociable, et en aucun cas le produit ne vous serait remboursé s'il ne satisfaisait pas à vos exigences personnelles".

Parfois, je prends conscience de l'absurdité de ce pari un peu fou que nous avons fait: construire un foyer, au sens littéral, tout en sachant qu'il sera éphémère, du moins dans sa forme actuelle. Donner tout ce que notre être est capable d'amour, sans en attendre de la gratitude ou de la réciprocité (la possibilité de ces dernières étant la cerise sur le gâteau!). La quintessence de l'amour parental donc, cette folie. Alors, quand ça m'étreint un peu trop le coeur, je me souviens de mes propres petites étincelles de liberté  gagnées les unes après les autres: la première fois que je suis allée à l'école toute seule, la première fois que j'ai payé le pain. La première fois que j'ai dépensé l'argent que j'avais économisé pour m'acheter un truc vraiment chouette. Mon premier livret A. Mon premier soutien-gorge (oui, aussi!). Et plus tard, toutes les acquisitions de la majorité: le droit de vote, le permis de conduire, la première fiche de paie, le premier appart. Je me souviens de ma fierté à chaque fois, de ma sensation d'en être, d'avoir un rôle à jouer. De mon fou-rire nerveux mémorable, lorsque je me suis retrouvée pour la toute première fois, seule à conduire la voiture de mon père (l'indépendance prend parfois de drôles de visages!). Chacun son tour.

Va, vis et deviens

 

PS: j'ai emprunté cette formule au magnifique film de Radu Mihaileanu, sorti en 2005, racontant l'histoire d'un enfant éthiopien, qui, en 1984, alors que la famine dévaste son pays, se fait passer, poussé par sa mère, pour un juif éthiopien afin d'être emmené en Israël où il pourra échapper à la mort. Cette mère sait parfaitement qu'elle ne reverra jamais son fils, mais pour lui sauver la vie elle préfère en être séparée. Bouleversant! Si vous ne l'avez pas vu, je vous le recommande chaudement (voir bande-annonce ci-dessous).

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J
Très joli billet ; merci ! <br /> J'ai immédiatement imaginé filmer ta filleule... volontaire autonome (ce n'est pas très clair comme terme mais je trouve que cela la caractérise : elle est autonome par sa seule volonté et/ou volontaire pour plus d'autonomie), elle nous étonne tous les jours ! Sa dernière en date : partir à son cours de violon toute seule, avec son 1/8 de violon, son sac... à noter que le simple accès au cours était déjà sa victoire (normalement accessible aux enfants de 7 ans et plus...) !<br /> Grosses bises !
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Z
J'espère que tu ne la laisses pas aller seule à son cours de violon hein, la coquine! Ah elle me fait rire, c'est un sacré numéro de filleule que tu m'as offert :) <3
M
Quand je vois tout ce que laisse faire certains parents à leurs enfants, je me dis que les miens n'ont pas beaucoup d'indépendance et d'autonomie. On les couve encore beaucoup. Et je crois que j'ai encore plus de mal à voir mon petit dernier grandir et à le laisser s'envoler.<br /> Ce n'est pas simple.
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Z
Pas simple non, mais on va s'y faire, obligé! ;)
E
Joli texte! Je ressens exactement ce que tu ressens parfois: à savoir que notre foyer est éphémère sous sa forme actuelle, ça me rend triste quand j'y pense, mais c'est la vie. On élève des enfants pour en faire des adultes épanouis!
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Z
Exactement, c'est le jeu si j'ose dire!
M
Très touchant ton billet... personnellement, j'ai la chance d'avoir une fille de 7 ans très très demandeuse d'autonomie. Ce qui me force à la lacher un peu et à ne pas la surprotéger... mais qu'ils sont durs à faire ces premiers pas de maman d'enfants qui grandissent !<br /> Hier, elle est restée pour la première fois seule à la maison, le temps que j'emmène son frère à l'école (elle était malade et est resté seule 15 mn à tout casser - devant un dessin animé)... Et bien, j'ai quasi piqué un sprint ! Mais qu'elle était fière hier...<br /> <br /> Mon fils, je pense que cela sera plus compliqué mais j'espère qu'il sera tiré par sa soeur !<br /> <br /> Allez, hauts les coeurs et regardons les grandir et s'épanouir, et effaçons nous tout doucement...<br /> <br /> Bises<br /> <br /> Virginie
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Z
La mienne n'a jamais jamais été demandeuse, je crois que ça va être d'autant plus difficile. Mais oui, comme tu dis, retirons-nous sur la pointe des pieds...<br /> Bises!
M
et oui ça n'est qu'un début.... cela dit, pour certaines choses, ils préfèrent attendre un peu avant l'autonomie..... (comme se faire tartiner la pate choco sur le pain.... )
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Z
Oui pour tous les trucs chiants d'ailleurs, c'est marrant! ;p